Monsieur le Directeur académique, Mesdames, Messieurs,
L’été a été marqué, pour le gouvernement, par une série de crises politiques. L’affaire Benalla a révélé les pratiques indignes d’un pouvoir autoritaire. Les hésitations du pouvoir au sujet du prélèvement à la source laissent présager une mise en place chaotique et témoignent de l’impréparation voire de l’aveuglement qui président à l’annonce de réformes menées à marche forcée. Alors même que la machinerie d’intoxication médiatique mise en branle par le gouvernement a pu sembler s’enrayer par moments, ce dernier poursuit sans relâche la mise à sac des garanties collectives et le démantèlement des acquis sociaux de l’après-guerre, initiés avant l’été, comme en témoignent les annonces du Premier Ministre le 26 août dernier à propos du budget 2019. Le quasi gel de l’aide au logement, des allocations familiales et des pensions de retraite seront un nouveau coup porté aux personnes et aux familles les plus fragiles afin de privilégier, selon le pouvoir en place, « les revenus de l’activité » ; en réalité, il s’agit bien plutôt d’imposer une politique d’austérité dictée par la doxa de Maastricht, alors même que le déficit public évalué à 60 milliards d’euros trouve en fait son origine dans les cadeaux fiscaux faits aux entreprises (40 milliards si l’on ajoute au CICE les baisses de cotisations patronales). Une fois de plus, il s’agit de sacrifier le plus grand nombre pour ménager les intérêts des « premiers de cordée ».
La publication opportune du rapport CAP 22 par une organisation syndicale a permis au pouvoir en place de tester ses orientations. S’il semble avoir renoncé à toucher directement au statut de la fonction publique, c’est en recrutant massivement des personnels contractuels que le gouvernement compte affaiblir le service public et réduire de manière drastique les dépenses.
Non content d’assujettir les populations à toujours plus de précarité, dans l’éducation nationale, il entreprend un tri social dès l’école. Les dispositifs de contrôle que sont les tests de positionnement automatisés déposséderont les équipes de leur expertise pédagogique, au profit d’un profilage prescriptif et de prétendues « bonnes pratiques » de remédiation. Après la réforme du collège, celle du lycée, loin d’avoir l’ambition de donner aux élèves une culture commune leur permettant une orientation éclairée et choisie, devra permettre à chacun.e de gagner la place qui lui aura été assignée. Enfin, la machine à broyer Parcoursup, qui a confirmé toutes nos inquiétudes, restera comme une soupape de sécurité pour éviter que la coupe « université » ne déborde, l’État étant devenu incapable de garantir le droit aux études supérieures au plus grand nombre au sein d’une classe d’âge.
L’éducation est bien le creuset majeur de l’offensive néolibérale menée par le pouvoir en place, à l’image de la loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel », adoptée au mois d’août 2018. Le démantèlement du service public d’orientation, à travers la régionalisation et la fermeture programmée d’une grande partie des CIO, vise à contenter le patronat, l’EdTech et tel.le président.e de région qui s’imagine attirer vers des métiers en tension de nombreux.ses jeunes, insinuant par là même que leurs professeur.e.s, leurs CPE et leurs PsyEN ne les ont pas bien informé.e.s quand, pour un autre éminent responsable politique, ils.elles ne les ont pas purement et simplement « flingué.e.s ». Un boulevard s’ouvre pour le privé comme nous avons pu le constater avec Parcoursup ! Le SNES-FSU reste déterminé à lutter contre ce projet de loi néfaste.
En Seine-Saint-Denis, les problèmes que nous avons soulevés en juin se déclinent désormais de manière concrète. Les dotations horaires des établissements restent insuffisantes pour compenser une croissance démographique élevée (augmentation de 1 500 heures pour presque 2 500 élèves [2471] en plus en Seine-Saint-Denis). La surcharge des lycées a posé de nombreux problèmes dans la confection des emplois du temps qui n’étaient pas toujours prêts pour la rentrée. Les effectifs des collèges augmentent également de manière inquiétante : le nombre de divisions à plus de 26 élèves est à nouveau en hausse à l’occasion de cette rentrée. Elles représentent maintenant 4,1% des divisions contre 3,9% en 2017 et 1,8% à la rentrée 2016. Dans le même temps, des collèges de l’éducation prioritaire voient certains niveaux dépasser le E/D de 24 élèves, comme c’est le cas au collège Roger Martin du Gard à Épinay-sur-Seine (24,22 élèves en 6e) ou au collège Jean Renoir à Bondy (24,67 élèves en 5e), des établissements pourtant classés REP, sans parler du collège Garcia Lorca à Saint-Denis (25 élèves en 5e), un établissement pourtant classé REP + ! Nous exigeons que les seuils historiques du département soient rétablis : 25 élèves par classe dans les collèges non classés, 24 en REP / REP+, 23 en sensible.
De même, les moyens d’assistance éducative sont en constante tension : nous l’avons rappelé lors du CTSD du 29 juin dernier, le taux d’encadrement ne cesse de baisser chaque année dans le département : 1 AED pour 72 élèves à la rentrée 2015, 1 AED pour 74 élèves à la rentrée 2016, 1 AED pour 78 élèves à l’occasion de la dernière rentrée ; c’est maintenant 1 AED pour 80 élèves. Certains établissements classés en éducation prioritaire affichent même un ratio qui tourne autour d’1 AED pour 100 élèves voire plus de 100 élèves ! Force est de constater que nous sommes, là encore, loin du compte : la logique d’économies budgétaires l’emporte une nouvelle fois sur les nécessités pédagogiques et éducatives.
Pendant ce temps, la direction académique célèbre de concert avec le conseil départemental de Seine-Saint-Denis l’inauguration de trois nouveaux collèges à l’occasion de la rentrée 2018 quand l’une de ces ouvertures se fait, au collège Gisèle Halimi d’Aubervilliers, à l’abri de préfabriqués, dans des conditions tout à fait déplorables : une salle sans table, un CDI vide, quatre postes non pourvus au début de la semaine de rentrée, pour ne citer que ces exemples. En Seine-Saint-Denis, force est de constater que la réalité est loin de correspondre aux effets d’annonce…
Le SNES-FSU sera au cœur des mobilisations à venir dans le département. Il continue de revendiquer un plan de développement de l’éducation en Seine-Saint-Denis, pour faire face à la hausse démographique tout en améliorant les conditions d’enseignement et en aidant les élèves les plus fragiles. Pour toutes ces raisons, nous serons dans la rue le 9 octobre prochain, aux côtés de nos collègues, pour lutter contre la destruction de notre modèle social. Le SNES et la FSU ont donc décidé d’un plan d’action pour rassembler les collègues dans le but de promouvoir la fonction publique et le service public d’éducation (retraites, salaires, rôle des élu.e.s et des représentant.e.s des personnels, conditions de travail, notamment les effectifs des classes, le respect des métiers dans l’éducation, une carte élargie de l’éducation prioritaire). Dans ce cadre, l’action interprofessionnelle du 9 octobre constitue une étape. Un préavis de grève sera déposé. D’ici au 9 octobre, le SNES-FSU appelle à donner une visibilité aux questions éducatives par des heures d’information syndicale, des assemblées générales d’établissements, des adresses aux parlementaires, des conférences de presse… Il portera la parole des personnels et fera la lumière sur les réalités idéologiques et budgétaires de la réforme du lycée et sur ses conséquences en termes de postes et de conditions de travail. Le SNES-FSU entend poursuivre la campagne au mois de novembre par une action dans l’éducation, sous la forme d’une grève, dans le cadre intersyndical le plus large possible, et pense qu’il est tout aussi nécessaire de construire rapidement une action en faveur de la fonction publique.
En attendant, puisque nous sommes réuni.e.s aujourd’hui afin d’établir un premier bilan de cette rentrée, et avant d’aborder de manière plus détaillée la situation des établissements du département, nous avons quelques questions et observations :
Quel est, à l’heure actuelle, dans le département, le nombre d’élèves (classes banales, dispositifs spécifiques,…) qui ne sont pas encore affecté.e.s ?
Au moment même où le gouvernement en est réduit devant le fiasco de Parcoursup à jouer les escamoteurs de pacotille en faisant disparaître des milliers d’élèves sans proposition (le 5 septembre dernier, au niveau national, les « 3 000 candidats sans proposition » si l’on s’en tient aux éléments de langage ministériels, étaient en réalité 47 258 « mis en attente »), quel bilan chiffré dressez-vous de Parcoursup dans le département ? Combien d’élèves ont quitté la plate-forme ? Combien d’élèves restent encore sans proposition ? De quelles filières et de quelles séries sont-ils.elles majoritairement issu.e.s ? Si vous choisissez de ne pas répondre en invoquant, par exemple, la fin prochaine de la procédure (le 21 septembre) qui ne vous permettrait d’avancer que des chiffres provisoires, nous nous verrons dans l’obligation de communiquer quant au manque de transparence dont la direction académique fait preuve sur un sujet aussi sensible ;
Quel est, à l’heure actuelle, dans le département, le nombre d’élèves (classes banales, dispositifs spécifiques,…) qui ne sont pas encore affecté.e.s ?
- Au moment même où le gouvernement en est réduit devant le fiasco de Parcoursup à jouer les escamoteurs de pacotille en faisant disparaître des milliers d’élèves sans proposition (le 5 septembre dernier, au niveau national, les « 3 000 candidats sans proposition » si l’on s’en tient aux éléments de langage ministériels, étaient en réalité 47 258 « mis en attente »), quel bilan chiffré dressez-vous de Parcoursup dans le département ? Combien d’élèves ont quitté la plate-forme ? Combien d’élèves restent encore sans proposition ? De quelles filières et de quelles séries sont-ils.elles majoritairement issu.e.s ? Si vous choisissez de ne pas répondre en invoquant, par exemple, la fin prochaine de la procédure (le 21 septembre) qui ne vous permettrait d’avancer que des chiffres provisoires, nous nous verrons dans l’obligation de communiquer quant au manque de transparence dont la direction académique fait preuve sur un sujet aussi sensible ;
- Lors du dernier comité technique paritaire, le 29 juin dernier, vous aviez fait état de l’enveloppe exorbitante d’HSE dévolues au dispositif « Devoirs faits » dans le département (76 655 HSE soit l’équivalent de 118 ETP en lieu et place de moyens pérennes garantissant la stabilité des équipes pédagogiques). Vous aviez reconnu alors qu’elles étaient « loin d’être utilisées ». Quel est le bilan définitif de ce programme dans le département ? Une nouvelle enveloppe a été allouée au titre du premier trimestre de l’année scolaire 2018-2019 : quel en est le montant ? Nos remontées de terrain présagent d’un financement encore plus important à la rentrée 2018 ;
- La question des dispositifs spécifiques reste préoccupante dans le département :
• Les classes d’accueil (UPE2A) et les NSA qui bénéficient aux élèves allophones connaissent une nouvelle fois des difficultés : à la saignée horaire que nous dénoncions au moment des arbitrages en vue de la rentrée 2018 (- 5 heures pour les UPE2A / NSA) s’ajoutent de nouveau des affectations tardives, en dépit des engagements pris par la direction académique ; quel bilan de rentrée pouvez-vous établir quant à la scolarisation des élèves allophones dans le département ? En prévision des orientations budgétaires à venir, nous rappelons que le SNES-FSU revendique que tou.te.s les élèves des dispositifs spécifiques soient inscrit.e.s deux fois pour que des places leur soient réservées dans les classes : c’est le prix d’une inclusion réussie et réellement profitable. Nous exigeons que toutes les UPE2A soient dotées à hauteur de 26 heures et que les heures ex-NF soient réellement utilisées pour l’intégration de ces élèves. Enfin, nous défendons la liberté des équipes pédagogiques d’estimer les moments opportuns pour l’intégration et pour la sortie des élèves des dispositifs ; or, de nombreux établissements, nous y reviendrons, se retrouvent en grande difficulté pour intégrer les élèves issue.e.s des dispositifs spécifiques dans les classes du fait d’une hausse importante de leurs effectifs. Comment faire, par exemple, pour intégrer des élèves d’UPE2A ou d’ULIS au collège Barbara de Stains (classé REP), où les niveaux de 5e, de 4e et de 3e affichent tous complet (24 élèves) ?
• L’historique des ouvertures d’ULIS dans le département (+ 46 entre 2006 et 2018) semble témoigner, dans la droite ligne de la communication gouvernementale, d’une volonté affichée par la direction académique d’un meilleur accueil des élèves relevant du handicap dans le département : mais alors comment justifier les pertes subies dans les dotations horaires par ces mêmes dispositifs (- 4 heures) ? Là encore, nous observons les conséquences désastreuses d’une politique d’austérité que la direction académique assume pleinement tout en s’efforçant d’en masquer les effets.
Nous vous remercions de votre attention.