La rentrée dans le Val de Marne a un goût de déjà vu. Ainsi que les années précédentes, le service public d ?éducation comme les autres services publics paye cher le coût de la politique d ?austérité menée en France et en Europe. L ?objectif unique de cette politique - la réduction de la dette publique par une contraction des dépenses de l ?Etat - a de graves conséquences sur la réalité humaine qui est celle de nos établissements et de nos classes.
La situation de rentrée traduit d ?abord l ?insuffisance des dotations horaires globales attribuées aux établissements. Elles sont insuffisantes car elles sont déconnectée de l ?augmentation du nombre d ?élèves : Les enfants du « boom de l ?an 2000 » entrent en sixième et viennent gonfler des effectifs pléthoriques sans que les moyens suivent. En collège, il n ?est pas rare de voir des classes à 29 à 30 élèves par division comme dans les huit divisions de sixième du collège Albert Camus au Plessis-Trévise. L ?éducation dite prioritaire n ?est pas épargnée : les classes sont à 25 élèves dans tous les niveaux (sauf en troisième) au collège Wallon d ?Ivry. Les chiffres atteignent des sommets au collège Pierre Brossolette de Villeneuve Saint Georges avec 26 à 27 élèves en classe de sixième pourtant classé éducation prioritaire, zone sensible et prévention violence ! Comment penser réunir les conditions d ?un Service Public d ?Education de qualité dans ces conditions ?
Comment parler d ?équité entre tous élèves, axe central du Projet Académique, lorsque vous faites le choix de déposséder les établissements de leurs heures sensibles pour les donner à certains dispositifs prônant la déréglementation et concernant un nombre très restreint d ?élèves ? 3010 élèves pour les collèges classés en zone sensible de notre département contre 125 élèves à l ?internat d ?excellence de Cachan.
Autre conséquence des restrictions en heures d ?enseignement : les suppressions de groupes ou d ?options. Au collège Monod de Vitry, c ?est la grande hécatombe : 15 heures sensibles en moins, suppression du soutien en français et en mathématiques, de l ?option italien LV2, fin des groupes de SVT en quatrième et d ?EPS en quatrième et en troisième ! C ?est donc bien encore une fois la pédagogie et la qualité du service public qui est atteint.
L ?austérité c ?est aussi l ?économie de bouts de chandelles. Dans les établissements, le renouvellement des manuels semble bien souvent répondre à une hiérarchie des priorités peut regardante de l ?aspect pédagogique alors que c ?est justement cet aspect qui est mis en avant pour justifier la fréquence des changements de programme. Les élèves sont donc les premiers à pâtir de ce paradoxe. Les élèves de troisième du collège Pasteur de Villejuif devront donc utiliser les anciens manuels pour le nouveau programme d ?histoire cette année car aucun manuel nouveau n ?a pu être acheté. Ils ne seront pas seuls à manquer de livre scolaire : ce sera également le cas de leurs camarades du collège Giroud de Vincennes ou de Willy Ronis à Champigny.
Dans les établissements, cette politique d ?austérité se concrétise également par une précarité toujours plus grande des personnels. Les textes réglementaires sont trop souvent bafoués : nombre de nos collègues voient leurs services éclatés entre plusieurs établissements souvent très éloignés. Ainsi, au collège Molière d ?Ivry, un collègue (en musique) se voit contraint de partager son service entre quatre établissements, deux communes et deux départements ! Une collègue TZR (histoire géographie) partage son service entre deux lycées de Saint Maur et un collège au Plessis-Trévise dans lequel elle vient faire trois heures de cours sans même bénéficier de l ?heure de décharge à laquelle elle a droit. Au collège Lucie Aubrac de Champigny, une enseignante en science physique partage son service sur trois établissements. Des stagiaires se retrouvent sans tuteur dans leur établissement comme au collège Molière d ?Ivry. Que dire de leur décharge de trois heures ? une heure de plus seulement de l ?année dernière dans l ?académie ? sinon qu ?elle ne permet toujours pas ni une entrée dans le métier sereine ni de surmonter la charge de travail qu ?ils rencontrent. ? Nous continuons de dénoncer cette précarité que ce soit celle des stagiaires, des contractuels, des vacataires et celle d ?éventuels contrats d ?avenir tels qu ?annoncés actuellement par le nouveau gouvernement.
Que dire aussi des chefs d ?établissement qui étendent leurs fonctions jusqu ?à devenir concessionnaires automobiles et conseillent un achat de véhicule à une jeune collègue nommée sur trois établissements plutôt qu ?un arrangement d ?emploi du temps ? !
Dans ces conditions, il est donc logique que des établissements soient déjà en lutte comme par exemple au collège Brossolette de Villeneuve Saint Georges où les personnels se mobilisent pour l ?ouverture d ?une nouvelle sixième ou collège Monod d ?Ivry où c ?est pas un grève menée dès la rentrée que les collègues dénoncent la diminution drastique de leur DHG et leurs conditions de rentrée.
Cette rentrée est aussi marquée par le maintien de réformes néfastes qui continuent de dénaturer le rôle social de l ?école comme nos fonctions :
Au collège, le livret personnel de compétence reste un problème majeur. Il est en effet maintenu dans les collèges et cela est consternant pour au moins deux raisons :
La première est l ?opposition de la majeure partie de nos collègues à ce dispositif et qu ?aucune réforme n ?a jamais abouti quand l ?immense majorité d ?une profession s ?y oppose.
La seconde raison se fonde sur les engagements de campagne de moratoire du nouveau gouvernement et les déclarations de Vincent Peillon, notre ministre, qui débouchent sur la certitude que si le LPC était maintenu il n ?aurait plus rien à voir avec l ?actuel.
Comment des chefs d ?établissement peuvent-ils exiger que le LPC soit rempli au regard des déclarations de leur ministre ? Cela renforce la détermination du SNES-FSU à dénoncer ce dispositif qui, plutôt qu ?améliorer nos pratiques pédagogiques dénature nos fonctions et oriente l ?école vers une fonction utilitariste soumise à la logique du marché du travail.
Le dispositif ECLAIR est également maintenu malgré son évidente nocivité. En confondant autonomie des établissements et autonomie du chef d ?établissement, on arrive à des situations particulièrement explosives comme au collège Elsa Triolet de Champigny où la décision prise en interne d ?ouvrir une nouvelle classe de troisième sans moyen supplémentaire a entraîné la suppression de tous les dédoublements en sciences et où les personnels subissent de plus en plus de pressions liées au classement de leur établissement. Le SNES-FSU continue d ?affirmer que l ?école n ?est ni une entreprise, ni une marchandise et ne peut être gérée comme telle.
Nous protestons également très vivement contre le sort réservé à l ?enseignement des disciplines technologiques. Contrairement à ce qu ?il pourrait apparaître, la réforme actuelle de la voie technologique ne concerne pas seulement le lycée. Non, la contraction d ?une quarantaine de spécialités en quatre disciplines en voie technologique, outre qu ?elle reflète un mépris total de la qualification des enseignants, représente une grave rupture de la chaîne de transmission des connaissances techniques. Cette réforme est un incendie dans une bibliothèque : elle fait courir en France le danger imminent d ?une perte de connaissances technologiques. En cela, elle nous concerne tous en tant que citoyen comme représentant un enjeu majeur de civilisation : le rapport de l ?homme à sa technique et donc au produit de l ?ensemble de l ?histoire de l ?humanité. Alors que les sociétés françaises et européennes payent durement le coût de la désindustrialisation, elle constitue un lourd contre-sens . Le SNES-FSU continue de plaider pour un enseignement technologique de qualité en collège comme en lycée répondant à la hauteur des enjeux sociaux et de civilisation qu ?il représente.
Le SNES-FSU sera aux côtés des collègues mécontents de leurs conditions de travail et de la dénaturation du rôle assigné à l ?école. Le SNES-FSU prendra toute sa part dans les luttes à venir.