Force est de constater que la réforme des concours de l’éducation nationale a rebattu les cartes des affectations des stagiaires CPE en ce début d’année scolaire. Alors qu’ils étaient 4 stagiaires CPE à temps-plein en 2021-2022, ils sont désormais 51 dont une dizaine de « petits veinards » positionnés CHACUN sur deux établissements différents, voire éloignés géographiquement. Quel accueil l’institution leur offre-t-elle ?
Cette situation crée une inégalité de traitement inadmissible entre les CPE stagiaires affectés sur deux établissements différents et ceux affectés à temps-plein dans le même établissement disposant de conditions d’exercice plus favorables afin de mener à bien cette année cruciale et très particulière qu’est l’année de stage.
Il nous sera peut-être objecté que les années précédentes, des CPE stagiaires étaient affectés à mi-temps sur un établissement, et réussissaient pour autant à s’investir et s’impliquer pleinement dans l’exercice de leurs missions. Cependant, cette situation n’est pas comparable avec celle des stagiaires affectés à plein temps sur deux établissements. En 2021-2022, les établissements, en lien étroit avec les INSPE, pouvaient s’organiser afin que le CPE stagiaire ne soit pas sollicité lors des journées de formation. Compte tenu des changements induits par la réforme, il semble particulièrement ambitieux, voire irréaliste, de demander à deux établissements de prendre en compte, dans leur organisation, un seul personnel présent à mi-temps afin de lui permettre de s’investir pleinement : présence aux diverses réunions, participation aux instances… Il semble illusoire de croire que les agendas de chacun puissent être bouleversés pour ce seul personnel, et ce entre deux établissements scolaires différents, parfois éloignés les uns des autres. Aucun emploi du temps ne peut permettre à ces collègues de pouvoir prendre réellement et pleinement part à la vie de l’établissement et de mener à bien l’exercice de leurs missions : quel que soit leur emploi du temps, comment suivre au plus près les situations individuelles et collectives des élèves ? Comment s’organiser afin de rencontrer et d’échanger avec les autres personnels de l’établissement, qui ne seront pas nécessairement présents sur les mêmes plages horaires ? Quid des rendez-vous avec les familles ? Comment mener à bien des projets adaptés aux besoins et au contexte de l’établissement, sans risquer de tomber dans une forme « d’artificialité » et de « superficialité », enjeu d’autant plus central que leur pertinence et leur mise en œuvre effective est évaluée lors de l’année de stage.
Pire encore, la question de l’évaluation entre les deux chefs d’établissement n’a pas encore été tranchée par l’administration ! Une nouvelle fois, l’éducation nationale s’illustre par son manque d’anticipation et son amateurisme : preuve de sa méconnaissance, voire de son mépris, des missions des CPE.
N’oublions pas que dans ces conditions d’affectation, un.e CPE stagiaire court le risque de se retrouver écartelé.e entre des établissements très différents (collège, lycée, lycée professionnel) et dont les spécificités ainsi que le contexte peuvent se trouver à l’opposé. Enfin, comment peut-on affecter des stagiaires plus mal qu’aucun titulaire tout en prétendant leur porter attention. « L’académie-école » se renie à procéder de la sorte !
On en conviendra, ces conditions sont loin, très loin, d’être optimales pour ces collègues.
Nous ne voulons pas nous positionner comme des « Cassandre », ni nous montrer alarmistes outre mesure, mais comme tous les citoyens français dotés d’un accès aux médias, nous entendons chaque jour parler de démissions toujours plus nombreuses dans l’éducation nationale et nous ne pouvons pas nous empêcher de nous demander si ces affectations, à notre sens aberrantes pour toutes les raisons évoquées plus tôt, ne risquent pas de concourir à augmenter ce chiffre inquiétant des démissions de collègues stagiaires et titulaires.
Dès la découverte de ces affectations aberrantes, le SNES Créteil est intervenu face à une administration qui a été jusqu’à défendre le coté « formateur » d’une telle maltraitance. Le Recteur a cependant bien dû reconnaître la nécessité de ré-examiner ces situations et, à ce jour, il ne reste que sept stagiaires aussi mal affectés. Nous continuerons de nous battre pour obtenir toutes les améliorations possibles et, au-dela, que ces conditions ne viennent pas compromettre la titularisation des collègues concernés. Le SNES-FSU CPE restera vigilant sur les conditions de travail de tous les CPE, qu’ils soient stagiaires, titulaires et contractuels.