En butte à une grande hostilité de la part des enseignants, la ministre veut aller vite. Pour répondre à cette urgence, le rectorat de Créteil a communiqué aux équipes de direction un calendrier anticipé de formation à la réforme du collège. Dans une logique managériale, les formations seront imposées de manière pyramidale : d’abord les équipes de directions, puis les coordonnateurs de cycles, les coordonnateurs de disciplines et enfin tous les enseignants. Tout concourt à favoriser l’émergence d’une hiérarchie intermédiaire parmi les enseignants de collège, à très brève échéance.
Au c ?ur de ce dispositif, le Conseil pédagogique fait figure de poste avancé, puisque ses membres sont d’ores-et-déjà désignés pour être les zélateurs de la réforme. C’est d’ailleurs en ce sens qu’il faut interpréter l’imposition simultanée des IMP (Indemnité pour Missions Particulières) : il s’agit de rétribuer les personnels chargés de promouvoir la réforme auprès de leurs pairs. Il est donc urgent d’adopter une stratégie locale pour bloquer le principal rouage de cette réforme.
Le conseil pédagogique a été institué par la loi Fillon de 2005, mais il a fallu attendre la réforme du lycée Chatel pour en saisir la profonde nocivité. Dès cette époque, les enseignants de lycée établissent un lien direct entre le renforcement des prérogatives des proviseurs, l’élaboration d’une hiérarchie intermédiaire parmi les enseignants et la volonté de contourner les instances démocratiques - en l’occurrence le CA - pour imposer des politiques scolaires rétrogrades. Sans surprise, en cette rentrée 2015, N. Vallaud-Belkacem reprend la formule éprouvée par ses prédécesseurs, en choisissant de confier aux membres de cette instance la promotion de sa réforme. Le conseil pédagogique semble en effet à nouveau tout désigné pour devenir le pivot de la réforme, et partant, l’instance qu’il faut neutraliser prioritairement.
Le mode de désignation des professeurs change à la rentrée 2015
Pour prendre de court les opposants à la réforme, le ministère a choisi de modifier en cette rentrée le mode de désignation des membres du conseil pédagogique. Il revient désormais aux équipes pédagogiques de désigner des volontaires dans les 15 jours qui suivent la rentrée. Pour être dans les temps, il faut donc remettre ces listes à vos équipes de direction avant Mardi 15 septembre 2015. Passée cette date, la loi prévoit que « le chef d ?établissement choisit les membres du conseil pédagogique parmi les enseignants de l ?établissement ; [...] et qu’il informe de cette désignation le conseil d ?administration lors de la réunion qui suit. Il porte la composition du conseil pédagogique à la connaissance de la communauté éducative par voie d ?affichage. ».
La composition du conseil pédagogique
Le code de l’éducation dispose que le conseil pédagogique est présidé par le chef d ?établissement, ou son adjoint, en cas d ?absence. Il se compose d’au moins un professeur principal de chaque niveau d ?enseignement ; d’au moins un professeur par champ disciplinaire ; d’un conseiller principal d ?éducation et, le cas échéant, du chef de travaux. En outre, la loi prévoit que « le nombre des professeurs s ?ajoutant à ceux prévus par cette disposition est arrêté par le conseil d ?administration. Le chef d ?établissement désigne, en début d ?année scolaire, les membres du conseil pédagogique et les suppléants éventuels parmi les personnels volontaires, après consultation des équipes pédagogiques intéressées. Il en informe le conseil d ?administration lors de la réunion qui suit cette désignation. »
Quelle stratégie adopter dans les établissements ?
En fonction des situations locales, plusieurs tactiques sont possibles : lorsque le rapport de force est favorable, l’une des stratégies les plus efficace pourrait être de faire adopter par le CA un nombre conséquent de membres voire la totalité des enseignants, par exemple grâce à l ?application de l ?article R.421-41-1, qui prévoit « que le nombre des professeurs s ?ajoutant à ceux prévus (...) est arrêté par le CA... ». Dans ce cas précis, les collègues pourraient refuser majoritairement de siéger lors des réunions du conseil pédagogique, ou bien renouveler systématiquement ses membres, afin d’invalider les fondements de cet outil : établir une courroie de transmission entre les équipes de direction et les personnels pour piloter la réforme. Face à la volonté de l’administration de se doter de nouveaux outils de management, il va nous falloir réfléchir à l’occasion de notre congrès et des stages syndicaux, à la meilleure manière de nous défendre.